
Contrairement à l’idée reçue, la recherche universitaire n’est pas un luxe inaccessible pour les PME québécoises, mais un levier de croissance stratégique et abordable.
- Les coûts d’un projet R&D peuvent être réduits jusqu’à 75% grâce à des programmes gouvernementaux comme Mitacs.
- Des organismes comme Axelys agissent comme des traducteurs pour connecter votre besoin d’affaires à l’expertise scientifique adéquate.
- La collaboration est une voie royale pour identifier et recruter des talents hautement qualifiés qui connaissent déjà votre entreprise.
Recommandation : Abordez la collaboration non comme une dépense, mais comme un investissement maîtrisé dans votre technologie, votre propriété intellectuelle et votre futur capital humain.
Pour un dirigeant de PME au Québec, le quotidien est un flux constant de défis à relever. Un produit à améliorer, un procédé à optimiser, une idée innovante qui pourrait tout changer… mais les ressources R&D internes sont limitées. L’idée de collaborer avec une université ou un centre de recherche traverse l’esprit, mais elle est souvent balayée par une vague d’appréhensions : trop cher, trop complexe, trop théorique. On imagine un labyrinthe administratif, des négociations interminables sur la propriété intellectuelle et des coûts hors de portée.
Ces craintes sont légitimes, mais elles reposent sur une vision dépassée de la collaboration public-privé. Et si, au lieu d’une montagne inaccessible, la recherche universitaire québécoise était en réalité une formidable boîte à outils conçue pour vous ? La clé du succès n’est pas de tout comprendre, mais de savoir quels leviers activer, et dans quel ordre. Le véritable enjeu n’est plus seulement de savoir « quoi » faire, mais « comment » transformer un besoin d’affaires en un projet de recherche concret, financé et rentable. Il ne s’agit pas de dépenser, mais d’investir de manière stratégique.
Cet article démystifie le processus. Il vous offre un parcours balisé, étape par étape, pour transformer le potentiel immense de la recherche québécoise en un avantage concurrentiel tangible pour votre PME. Nous verrons comment trouver le bon expert, comment des programmes peuvent payer jusqu’à 75% de votre stagiaire R&D, comment sécuriser vos innovations et même comment dénicher vos futurs employés vedettes au cœur des laboratoires.
Pour vous guider à travers les différentes facettes de cette opportunité, cet article est structuré pour répondre aux questions concrètes que se pose tout dirigeant de PME. Le sommaire ci-dessous vous donnera un aperçu clair du chemin que nous allons parcourir ensemble.
Sommaire : Votre guide stratégique pour la collaboration recherche-PME au Québec
- Le pont entre vous et le chercheur : à quoi servent les sociétés de valorisation ?
- Votre stagiaire R&D payé à 75% par le gouvernement : le guide des programmes de recherche collaborative
- La « Silicon Valley » de votre secteur se trouve peut-être au Québec : la carte des pôles d’excellence en recherche
- À qui appartiennent les résultats ? Le guide pour négocier la propriété intellectuelle avec une université
- Votre prochain employé star est aujourd’hui doctorant : comment le repérer grâce à la recherche collaborative
- Montréal, Québec ou Sherbrooke : où implanter votre entreprise technologique ?
- CLD, mentorat, chambre de commerce : qui fait quoi pour vous aider à démarrer ?
- Votre start-up au Québec : le plan d’action pour transformer l’idée en entreprise florissante
Le pont entre vous et le chercheur : à quoi servent les sociétés de valorisation ?
La première porte à laquelle frapper n’est souvent pas celle du chercheur, mais celle du « traducteur ». Les sociétés de valorisation de la recherche universitaire, comme Axelys qui centralise les activités pour de nombreuses institutions québécoises, jouent précisément ce rôle. Leur mission est de faire le pont entre le langage des affaires (vos besoins, vos marchés, vos contraintes) et celui de la science (les expertises, les équipements, les publications). Elles sont votre premier point de contact pour naviguer dans un écosystème qui peut sembler intimidant de l’extérieur. C’est un potentiel immense qui s’offre à vous ; à titre d’exemple, le budget de recherche des universités québécoises s’élève à plus de 2 milliards de dollars annuellement.

Concrètement, lorsque vous contactez une société de valorisation avec un défi R&D, leur équipe de professionnels va cartographier les expertises disponibles à travers le réseau universitaire pour identifier le ou les chercheurs les plus pertinents pour votre projet. Ils facilitent la première rencontre, aident à définir le périmètre du projet et vous orientent vers les mécanismes de financement appropriés. Aborder ces sociétés avec des questions précises est crucial : demandez-leur des exemples de collaborations similaires dans votre secteur ou quels sont leurs modèles de partage de la propriété intellectuelle par défaut. C’est le premier levier d’activation pour un partenariat réussi.
Votre stagiaire R&D payé à 75% par le gouvernement : le guide des programmes de recherche collaborative
L’une des plus grandes barrières à l’innovation pour une PME est le coût perçu de la R&D. C’est ici qu’intervient le levier financier le plus puissant de la collaboration : les programmes de recherche subventionnée. Le plus connu et le plus accessible est sans doute le programme Mitacs Accélération. Le principe est simple et redoutablement efficace : votre entreprise finance un projet de recherche mené par un stagiaire (maîtrise, doctorat, postdoctorat) et Mitacs, avec le soutien des gouvernements, double votre mise. Votre contribution ne représente qu’une fraction du coût total.
Pour un dirigeant de PME, cela signifie concrètement avoir accès à un talent hautement qualifié, supervisé par un professeur d’université et utilisant des infrastructures de pointe, pour un coût souvent inférieur à celui d’une embauche classique. Le tableau suivant illustre l’impact financier de manière éloquente, basé sur les données du programme Mitacs. Il met en lumière comment le partenariat transforme un investissement important en une dépense très maîtrisée, comme le montre une analyse comparative des coûts.
| Élément de coût | Sans programme | Avec Mitacs Accélération |
|---|---|---|
| Salaire stagiaire (4 mois) | 20 000 $ | 5 000 $ (contribution PME) |
| Supervision académique | Non incluse | Incluse |
| Accès aux laboratoires universitaires | À négocier | Inclus |
| Formation complémentaire | À payer en sus | Incluse |
| Économie totale pour la PME | – | 75% du coût total |
Au-delà de Mitacs, d’autres programmes comme ceux du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada (CRSNG) offrent également des subventions d’engagement partenarial. L’important est de comprendre que vous n’êtes pas seul pour financer l’innovation. Les sociétés de valorisation et les bureaux de recherche des universités sont là pour vous aider à monter les dossiers de financement et à maximiser l’effet de levier de chaque dollar que vous investissez.
La « Silicon Valley » de votre secteur se trouve peut-être au Québec : la carte des pôles d’excellence en recherche
Il n’est pas toujours nécessaire de viser les grandes universités montréalaises pour trouver l’expertise dont vous avez besoin. Le Québec dispose d’un maillage exceptionnel de centres de recherche appliquée, souvent plus agiles et très connectés au tissu industriel local : les Centres collégiaux de transfert de technologie (CCTT). Ces centres sont des piliers de l’innovation régionale. En effet, répartis dans 15 régions du Québec, les centres collégiaux de transfert de technologie couvrent des secteurs de pointe allant de l’agriculture intelligente à la fabrication additive. Ils représentent une ressource de proximité inestimable pour les PME en région.
Plutôt que d’attendre passivement que la solution vienne à vous, vous pouvez adopter une démarche proactive pour trouver le bon expert. La « recherche inversée » consiste à partir de votre problème technique très spécifique pour identifier les chercheurs qui publient sur ce sujet. Des outils comme Google Scholar ou les bases de données de brevets sont des mines d’or. En identifiant les auteurs de publications pertinentes, vous pouvez contacter directement le chercheur le plus prometteur. Cette approche directe est souvent très appréciée et peut accélérer considérablement le processus.
Votre plan d’action pour trouver le bon expert
- Identifier précisément votre problème technique ou défi d’innovation.
- Utiliser Google Scholar avec des mots-clés spécifiques de votre domaine, en ajoutant « Québec » ou le nom d’une université.
- Consulter les bases de données de brevets canadiens pour repérer les inventeurs clés dans votre secteur.
- Repérer les publications scientifiques récentes des chercheurs qui vous semblent pertinents.
- Contacter directement le chercheur via son courriel institutionnel ou son profil LinkedIn, en présentant clairement votre défi.
Cette méthode vous donne le contrôle. Vous ne dépendez plus d’un intermédiaire pour trouver la perle rare. Vous devenez l’initiateur de la collaboration, ce qui vous place dans une position de force pour la suite des discussions. C’est la preuve que l’écosystème d’innovation est à votre portée, si vous savez où et comment chercher.
À qui appartiennent les résultats ? Le guide pour négocier la propriété intellectuelle avec une université
C’est souvent la question la plus anxiogène pour un entrepreneur : si je finance une recherche, qui sera propriétaire de l’invention qui en découle ? La réponse est : « ça se négocie ». Loin d’être un obstacle infranchissable, la négociation de la propriété intellectuelle (PI) est une étape structurée et prévisible du processus de collaboration. Comme le résume bien Luc Sirois, directeur général d’Axelys, l’objectif commun est clair : « On investit des centaines de millions dans la recherche dans le milieu universitaire, les centres de recherche, et c’est de dire : comment on peut faire pour que cette recherche se transfère vers la société le mieux possible ».
On investit des centaines de millions dans la recherche dans le milieu universitaire, les centres de recherche, et c’est de dire : comment on peut faire pour que cette recherche se transfère vers la société le mieux possible
– Luc Sirois, La Presse – Création d’Axelys
Plusieurs modèles existent. L’université peut rester propriétaire du brevet et vous accorder une licence d’exploitation exclusive (vous êtes le seul à pouvoir l’utiliser) ou non exclusive, en échange de redevances. Une autre option est la copropriété, où l’entreprise et l’université partagent les droits. Le choix dépend de votre modèle d’affaires, de votre contribution au projet et de votre stratégie de marché. L’important est que tout soit clarifié dans une entente avant le début des travaux.
Étude de cas : Le processus de valorisation à l’UQAC
L’Université du Québec à Chicoutimi offre un bon exemple du parcours de la PI. Lorsqu’un chercheur fait une déclaration d’invention, Axelys mène une évaluation technico-commerciale. Si le potentiel est confirmé, une entente est signée entre l’université et l’inventeur, clarifiant les droits, les obligations, le paiement des frais de protection (brevets) et le partage des futures redevances. Ce processus structuré assure que l’inventeur reste impliqué, notamment dans la rédaction du brevet, garantissant un transfert de connaissances efficace vers un partenaire industriel.
N’ayez pas peur de cette étape. Les sociétés de valorisation ont l’habitude de négocier ces ententes avec des PME. Leur but n’est pas de bloquer l’innovation, mais de trouver un accord gagnant-gagnant qui permet à la technologie de voir le jour sur le marché tout en assurant un juste retour à l’institution publique.
Votre prochain employé star est aujourd’hui doctorant : comment le repérer grâce à la recherche collaborative
Un des bénéfices les plus sous-estimés de la collaboration avec le milieu universitaire n’est pas technologique, mais humain. Un projet de recherche mené via un programme comme Mitacs est en réalité une période d’essai prolongée et subventionnée pour un futur employé potentiel. Le stagiaire, doctorant ou postdoctoral, travaille sur un problème concret de votre entreprise, s’imprègne de votre culture et développe une expertise directement applicable à vos besoins. C’est une stratégie de recrutement de talents à très faible risque et à très haute valeur ajoutée.
Pour transformer cette opportunité en succès, il faut aborder le stage avec une vision de recrutement dès le départ. Il ne s’agit pas seulement de superviser une tâche, mais d’évaluer un potentiel. Définissez en amont les critères techniques et humains qui feraient de ce stagiaire un bon employé. Organisez des points réguliers pour évaluer son autonomie, sa capacité à résoudre des problèmes et sa proactivité. Confiez-lui un projet avec des livrables clairs pour tester ses compétences en gestion de projet et observez son intégration au sein de votre équipe existante.
À la fin du stage, vous aurez une connaissance approfondie de ses compétences techniques, de ses « soft skills » et de son adéquation avec votre culture d’entreprise, bien plus qu’avec n’importe quel processus de recrutement classique. Si l’évaluation est positive, vous êtes en position idéale pour lui faire une offre d’embauche. Vous ne recrutez pas un inconnu, mais une personne déjà formée à vos défis et qui a déjà commencé à créer de la valeur pour vous. Dans un marché du travail compétitif, ce levier de capital humain est un avantage concurrentiel majeur.
Montréal, Québec ou Sherbrooke : où implanter votre entreprise technologique ?
La décision d’implanter ou de développer votre entreprise technologique dans une ville plutôt qu’une autre ne doit pas seulement reposer sur le coût de l’immobilier ou la logistique. L’accès à un écosystème d’innovation dynamique est un facteur crucial. Les grandes villes universitaires du Québec comme Montréal, Québec et Sherbrooke ne sont pas seulement des bassins de population ; ce sont des concentrateurs de talents, de laboratoires et de réseaux d’affaires. La proximité physique avec une université ou un centre de recherche partenaire peut amplifier les bénéfices de la collaboration.
Être situé près d’un campus facilite les rencontres informelles, permet à vos équipes de participer à des séminaires, et vous donne un accès privilégié aux événements de réseautage où naissent les futures collaborations. L’exemple de Polytechnique Montréal est parlant : en déployant des « courtiers en innovation » directement sur son campus, l’école crée un pont permanent avec les entreprises. Pour une PME installée à proximité, cela signifie des connexions plus rapides et un accompagnement de proximité pour transformer une technologie de laboratoire en succès commercial.
Chaque ville a ses forces. Montréal excelle dans l’intelligence artificielle et l’aérospatiale. Québec est un pôle en optique-photonique et en sciences de la vie. Sherbrooke brille en quantique et en nanotechnologies. Choisir où s’implanter, c’est aussi choisir son écosystème. S’installer au cœur d’un pôle d’excellence dans votre secteur, c’est se donner les moyens d’accélérer sa croissance en capitalisant sur un réseau dense d’expertises, de fournisseurs et de talents déjà présents sur place.
CLD, mentorat, chambre de commerce : qui fait quoi pour vous aider à démarrer ?
La collaboration avec un centre de recherche est un outil puissant, mais il ne s’agit que d’une pièce du grand puzzle de l’écosystème de soutien aux entreprises du Québec. En tant que dirigeant de PME, il est essentiel de comprendre que vous n’êtes pas seul. Un réseau dense d’organismes est là pour vous accompagner à chaque étape de votre croissance. Au Québec, on recense environ 250 000 PME représentant 99% des entreprises québécoises, et tout un écosystème est bâti pour les soutenir.
Les Centres locaux de développement (CLD) ou leurs équivalents municipaux sont souvent la porte d’entrée pour le soutien au démarrage et à l’expansion, offrant des conseils et l’accès à des fonds de développement locaux. Les programmes de mentorat, comme ceux offerts par le Réseau M, vous permettent de bénéficier de l’expérience de dirigeants chevronnés qui ont déjà parcouru le chemin que vous empruntez. Votre chambre de commerce locale est une plateforme de réseautage incontournable pour développer votre clientèle et trouver des partenaires d’affaires.
Ces organismes ne remplacent pas la collaboration R&D, ils la complètent. Un CLD peut vous aider à financer la part de votre projet Mitacs. Un mentor peut vous conseiller sur la meilleure stratégie de mise en marché de l’innovation issue de votre collaboration. Une chambre de commerce peut vous mettre en contact avec des manufacturiers pour produire votre nouveau produit. Comprendre « qui fait quoi » vous permet de construire un réseau de soutien robuste autour de votre projet d’innovation, maximisant ainsi vos chances de succès.
À retenir
- Les sociétés de valorisation comme Axelys sont votre meilleure porte d’entrée pour traduire un besoin d’affaires en projet de recherche.
- Des programmes comme Mitacs Accélération peuvent réduire votre contribution financière à un projet R&D jusqu’à 25% du coût total.
- La collaboration recherche est l’une des stratégies les plus efficaces pour identifier, former et recruter des talents de pointe à faible risque.
Votre start-up au Québec : le plan d’action pour transformer l’idée en entreprise florissante
Transformer une idée, même issue de la recherche la plus pointue, en une entreprise viable est un parcours qui va bien au-delà de la technologie. C’est un processus qui intègre la stratégie, le financement, le marketing et la gestion. Le Québec a démontré sa capacité à accompagner cette transformation. En effet, les PME contribuent significativement au Produit Intérieur Brut du Québec, représentant environ 50% de celui-ci, ce qui témoigne de la vitalité de son tissu entrepreneurial.
L’histoire de Studio ExeCo Inc. est une illustration parfaite de ce parcours. Partie d’une recherche en kinésiologie à l’UQAC, Laurie Simard a développé Cogni-Actif, une solution pour encourager l’activité physique chez les jeunes atteints de TDAH. Grâce à l’accompagnement d’Axelys et au Programme de soutien aux entrepreneurs scientifiques, sa recherche s’est muée en une entreprise innovante. C’est la preuve que le bon accompagnement peut transformer une thèse universitaire en un produit commercial à fort impact social.
Votre plan d’action doit donc intégrer ces leviers. Commencez par valider votre besoin marché avant même de finaliser le projet de recherche. Utilisez les programmes de collaboration non seulement pour développer votre technologie, mais aussi pour bâtir votre équipe de base. Protégez votre propriété intellectuelle dès le départ, car c’est un actif majeur pour attirer des investisseurs. Enfin, appuyez-vous sur l’ensemble de l’écosystème de soutien (CLD, mentorat, Investissement Québec) pour structurer votre croissance. La recherche n’est pas la fin du chemin, c’est le début d’une aventure entrepreneuriale.
Le chemin de l’innovation est à votre portée. Pour mettre en pratique ces conseils, l’étape suivante consiste à évaluer précisément votre défi technologique et à contacter l’organisme de valorisation de votre région pour une première discussion exploratoire.