
Choisir un métier d’avenir au Québec n’est plus une question de diplôme, mais de compréhension des forces structurelles uniques à la province.
- Le départ massif des baby-boomers crée des opportunités stratégiques au-delà des pénuries évidentes.
- La culture syndicale et la géographie économique (Montréal vs régions) sont des variables décisives à maîtriser.
Recommandation : Votre succès dépendra moins de votre spécialisation technique que de votre capacité à développer des compétences humaines et une intelligence culturelle spécifiquement québécoise.
Face à un marché du travail en pleine mutation, choisir sa voie professionnelle au Québec peut ressembler à un pari. Les listes de « métiers en demande » se multiplient, promettant des carrières dans l’intelligence artificielle, la santé ou la construction. Si ces indications sont utiles, elles ne révèlent qu’une partie de l’équation. Se fier uniquement à ces listes, c’est un peu comme naviguer avec une carte incomplète : on voit la destination, mais on ignore les courants, les vents dominants et les passages secrets.
La discussion se concentre souvent sur les compétences techniques et les diplômes nécessaires. On vous dira qu’il faut apprendre à coder, obtenir une certification en gestion de projet ou suivre une formation professionnelle spécialisée. Ces conseils sont valables, mais ils occultent une réalité plus profonde et typiquement québécoise. Et si la véritable clé d’une carrière à l’épreuve du futur ne résidait pas seulement dans le *quoi* apprendre, mais dans le *comment* naviguer l’écosystème de carrière unique de la Belle Province ?
Cet article propose une rupture avec les guides traditionnels. Au lieu de vous fournir une énième liste de professions, nous allons analyser les forces structurelles qui façonnent réellement le marché du travail québécois. De l’onde de choc démographique des baby-boomers à la culture syndicale omniprésente, en passant par le calcul stratégique entre Montréal et les régions, nous vous donnerons les clés pour faire un choix de carrière éclairé. Il s’agit de développer une véritable intelligence du marché local pour non seulement trouver un emploi, mais construire une trajectoire professionnelle résiliente et épanouissante.
Pour vous guider dans cette analyse stratégique, cet article est structuré pour décortiquer chaque facette de l’écosystème québécois. Vous découvrirez les dynamiques profondes qui créent les opportunités, les compétences qui font réellement la différence et les codes culturels à maîtriser pour réussir.
Sommaire : Décoder le marché du travail québécois pour une carrière d’avenir
- La « grande retraite » des baby-boomers : comment elle transforme le marché du travail et crée des opportunités en or
- Le « top 5 » des secteurs qui s’arrachent les talents au Québec
- Syndiqué ou pas ? Le guide pour comprendre le rôle et le pouvoir des syndicats au Québec
- Votre diplôme ne suffit plus : les 5 compétences humaines qui feront la différence pour votre carrière
- Montréal ou région ? Où votre carrière a-t-elle le plus de chances de décoller ?
- Ce que les meilleurs veulent vraiment (et que votre entreprise n’offre peut-être pas)
- Ils ne viennent pas que pour le salaire : les vrais arguments pour convaincre un talent international
- Le guide du nouvel arrivant pour décrocher un emploi au Québec (et le garder)
La « grande retraite » des baby-boomers : comment elle transforme le marché du travail et crée des opportunités en or
Le phénomène le plus structurant du marché du travail québécois actuel n’est pas technologique, mais démographique. La « grande retraite » des baby-boomers est bien plus qu’un simple sujet médiatique ; c’est une force tectonique qui redessine le paysage professionnel. On estime qu’environ 500 000 postes seront à pourvoir au Québec d’ici 2028, majoritairement en raison de ces départs. Voir cette situation uniquement sous l’angle de la « pénurie de main-d’œuvre » est une erreur. C’est avant tout une vague d’opportunités sans précédent pour les nouvelles générations et les nouveaux arrivants.
Ces départs massifs ne créent pas seulement des postes vacants ; ils libèrent des positions de gestion, d’expertise et de leadership. Pour un jeune professionnel ou une personne en reconversion, cela signifie une possibilité d’accélération de carrière autrefois impensable. Les entreprises, confrontées à une perte massive de savoir institutionnel, sont désormais beaucoup plus ouvertes à promouvoir des talents moins expérimentés mais dotés d’un fort potentiel. L’enjeu pour elles n’est plus de recruter, mais de transférer la connaissance.
Les opportunités les plus subtiles et lucratives ne se trouvent pas toujours dans les grandes entreprises. La retraite des baby-boomers frappe durement les PME familiales, qui forment l’épine dorsale de l’économie québécoise. De nombreux fondateurs n’ont pas de relève désignée. Cela ouvre des perspectives uniques pour des profils entrepreneuriaux intéressés par la reprise d’entreprise. Des organismes comme Services Québec et les centres locaux de développement (CLD) proposent des programmes d’accompagnement pour faciliter ces transitions, offrant une voie rapide vers la direction d’une entreprise établie et rentable.
Le « top 5 » des secteurs qui s’arrachent les talents au Québec
Si la vague démographique crée le besoin, certains secteurs en sont les principaux bénéficiaires. Oubliez les listes génériques : pour faire un choix stratégique au Québec, il faut comprendre les écosystèmes sectoriels soutenus par des politiques gouvernementales fortes et des investissements massifs. Au-delà des suspects habituels, cinq grands domaines se distinguent par leur dynamisme et leur résilience.
Le premier est sans contredit celui de la santé et des services sociaux. Le vieillissement de la population ne fait qu’accentuer des besoins déjà criants, des infirmières aux préposés, en passant par les technologues médicaux et les travailleurs sociaux. Le deuxième est celui de la construction et de la transition énergétique. Le Québec s’est engagé dans une vaste décarbonation qui requiert des compétences en efficacité énergétique, en installation de systèmes écologiques et en rénovation de bâtiments existants.
Le troisième secteur clé est celui de l’économie verte et circulaire. De la gestion des déchets à la valorisation des ressources, en passant par le développement de matériaux durables, un nouvel écosystème industriel est en train de naître, poussé par des réglementations de plus en plus strictes. Le quatrième concerne l’agroalimentaire et l’agriculture technologique, où le Québec vise une plus grande autonomie. Cela se traduit par des besoins en automatisation, en science des données pour l’agriculture de précision et en ingénierie alimentaire.
Enfin, le secteur des technologies de l’information reste un pilier, mais il faut regarder au-delà du jeu vidéo et de l’IA. La numérisation de tous les autres secteurs (la santé, la construction, l’agriculture) crée une demande explosive pour des experts en cybersécurité, en analyse de données et en intégration de systèmes. C’est dans l’application de la technologie aux industries traditionnelles que se trouvent les gisements de croissance.

Ces cinq pôles ne sont pas isolés ; ils s’interconnectent. Un ingénieur en logiciel peut trouver une carrière à fort impact dans l’agriculture technologique, tout comme un gestionnaire de projet peut piloter la rénovation énergétique d’un parc immobilier. La clé est de voir au-delà des titres de postes pour comprendre les missions de ces écosystèmes en pleine expansion.
Syndiqué ou pas ? Le guide pour comprendre le rôle et le pouvoir des syndicats au Québec
Aucune analyse du marché du travail québécois n’est complète sans aborder une de ses plus grandes particularités : la syndicalisation. Avec l’un des taux les plus élevés d’Amérique du Nord, les syndicats ne sont pas une relique du passé, mais une force vive qui structure les carrières, les salaires et les conditions de travail dans de vastes pans de l’économie, notamment dans le secteur public, la construction et de nombreuses grandes industries. Ignorer cette réalité, c’est se priver d’une variable stratégique majeure dans son plan de carrière.
Pour un non-initié, le monde syndical peut paraître opaque. Des concepts comme la formule Rand (qui oblige tous les employés, syndiqués ou non, à payer une cotisation) ou la primauté de l’ancienneté sur la performance pour les promotions et la sécurité d’emploi sont des codes à déchiffrer. Un environnement syndiqué offre une sécurité d’emploi et des avantages sociaux (fonds de pension, assurances collectives) souvent bien plus généreux que dans le privé. En contrepartie, la progression de carrière peut y être plus lente et plus rigide, suivant des échelons prédéfinis.
Loin d’être figées, les grandes centrales syndicales québécoises (FTQ, CSN, CSQ) s’adaptent aux nouvelles réalités du travail. Elles ne se contentent plus de négocier des salaires, mais investissent des champs comme la formation continue, la déconnexion et l’encadrement de l’intelligence artificielle.
Étude de cas : l’adaptation stratégique des syndicats québécois
Face aux transformations du travail, les syndicats québécois innovent. Par exemple, la FTQ a récemment négocié des clauses de formation continue financée par l’employeur pour des dizaines de milliers de ses membres, incluant des budgets dédiés à la requalification numérique. De son côté, la CSN travaille activement sur des protocoles pour protéger les travailleurs contre l’automatisation et garantir une transition juste. Dans le secteur de l’éducation, la CSQ met l’accent sur le développement professionnel continu de ses membres pour intégrer les nouvelles pédagogies et technologies. Ces initiatives montrent que les syndicats évoluent d’un rôle purement défensif à un rôle de partenaire dans la gestion des carrières.
Le choix entre un poste syndiqué et un poste non syndiqué n’est pas une question de « bon » ou « mauvais », mais un arbitrage personnel. Il faut comparer la rémunération globale (salaire + valeur des avantages sociaux), la sécurité d’emploi, la culture d’entreprise et la rapidité de progression souhaitée. Comprendre cet écosystème est une compétence en soi, cruciale pour prendre une décision éclairée.
Votre diplôme ne suffit plus : les 5 compétences humaines qui feront la difference pour votre carrière
Dans un marché où les connaissances techniques deviennent rapidement obsolètes, le diplôme n’est plus une garantie de succès à long terme. Il est un ticket d’entrée, pas une assurance de progression. Les employeurs québécois, confrontés à des défis complexes, recherchent de plus en plus des compétences transversales, ou « humaines », qui agissent comme des multiplicateurs de valeur. Ce sont ces compétences-pivots qui vous permettront de naviguer les changements, de collaborer efficacement et de créer une valeur unique, quel que soit votre secteur.
Cinq de ces compétences se démarquent particulièrement dans le contexte québécois. La première est l’intelligence collective : la capacité à co-créer et à innover au sein d’équipes multidisciplinaires. La seconde est la résilience adaptative, soit l’aptitude à gérer l’incertitude et à transformer les contraintes en opportunités. Vient ensuite la pensée critique, essentielle pour évaluer l’information à l’ère de l’IA et de la désinformation. La quatrième est l’apprentissage continu (ou « apprenance »), la discipline de se former et de se réinventer tout au long de sa vie.
Enfin, une compétence souvent sous-estimée mais cruciale au Québec est l’intelligence culturelle. C’est la capacité à comprendre et à naviguer avec aisance entre les différents codes culturels, linguistiques et professionnels. Comme le souligne une experte du marché du travail :
Au Québec, la capacité à naviguer entre les cultures et à comprendre les nuances linguistiques devient un avantage concurrentiel majeur, surtout à Montréal où 56% des entreprises opèrent dans un contexte multiculturel.
– Marie-Claude Gaudet, Rapport sur les compétences du futur – Commission des partenaires du marché du travail
Ces compétences ne s’acquièrent pas dans un manuel. Elles se développent par l’expérience, la formation ciblée et une volonté de sortir de sa zone de confort. Heureusement, l’écosystème québécois offre de nombreuses ressources pour les cultiver.
Votre plan d’action pour cultiver les compétences-pivots
- Intelligence collective : Impliquez-vous dans les zones d’innovation de Québec, comme le District Quantique à Sherbrooke ou l’Espace CDPQ à Montréal, pour collaborer sur des projets concrets.
- Résilience adaptative : Suivez les formations en gestion du changement et en leadership offertes par des institutions reconnues comme l’École des dirigeants HEC Montréal.
- Pensée critique : Inscrivez-vous aux ateliers de littératie numérique et d’évaluation de l’information proposés par Bibliothèque et Archives nationales du Québec (BAnQ).
- Intelligence culturelle : Participez aux programmes de jumelage interculturel d’organismes comme le CACI ou aux événements de réseautage de la Chambre de commerce du Montréal métropolitain.
- Apprentissage continu : Explorez l’offre de microprogrammes universitaires (UQAM, Concordia) et les attestations d’études collégiales (AEC) des cégeps pour des mises à jour de compétences ciblées et rapides.
Montréal ou région ? Où votre carrière a-t-elle le plus de chances de décoller ?
Le choix du lieu de vie et de travail est une décision stratégique qui impacte directement la trajectoire de carrière et la qualité de vie au Québec. Le débat « Montréal vs Régions » est souvent réduit à un simple arbitrage entre salaires élevés et coût de la vie moindre. Or, la réalité est bien plus nuancée. Il s’agit d’analyser les écosystèmes d’opportunités spécifiques à chaque territoire et de faire un calcul de la « valeur réelle » qui va bien au-delà du salaire brut.
Montréal, en tant que métropole, concentre une forte densité d’opportunités dans des secteurs de pointe comme l’intelligence artificielle, les sciences de la vie et le jeu vidéo. Les salaires y sont généralement plus élevés et l’accès à un réseau international est inégalé. Cependant, cette attractivité a un coût : un marché immobilier tendu, des temps de transport allongés et une compétition plus féroce pour les postes les plus convoités.
p>À l’inverse, les régions du Québec ne sont plus de simples alternatives « économiques ». Elles ont développé leurs propres pôles d’excellence. L’Estrie (Sherbrooke) est un hub en sciences de la vie et en quantique, la Mauricie (Trois-Rivières) se spécialise dans l’économie numérique et la transformation des PME, et le Saguenay–Lac-Saint-Jean est à la pointe de la transformation de l’aluminium et de la foresterie 4.0. Y travailler signifie souvent un accès plus rapide à des postes à responsabilités, une intégration plus facile dans la communauté et un impact plus direct sur les projets.
Le calcul du salaire « réel » est donc essentiel. Un salaire nominalement plus bas en région peut se traduire par un pouvoir d’achat et une qualité de vie supérieurs une fois le coût du logement et le temps de transport pris en compte. Le tableau suivant illustre ce calcul pour un profil de développeur informatique :
| Critère | Montréal | Sherbrooke | Trois-Rivières | Saguenay |
|---|---|---|---|---|
| Salaire moyen (Développeur) | 85 000 $ | 72 000 $ | 68 000 $ | 70 000 $ |
| Loyer moyen 2 chambres | 1 800 $/mois | 950 $/mois | 850 $/mois | 900 $/mois |
| Salaire net après logement | 63 400 $ | 60 600 $ | 57 800 $ | 59 200 $ |
| Temps de transport moyen | 45 min | 20 min | 15 min | 18 min |
| Opportunités secteur spécialisé | IA, Jeux vidéo | Sciences de la vie | Économie numérique | Aluminium, Foresterie 4.0 |
Ce tableau, basé sur une analyse du marché de l’emploi québécois, démontre que l’écart de salaire disponible après le logement est moins important qu’il n’y paraît. La décision finale dépend donc de vos priorités : la densité d’opportunités d’une métropole ou l’équilibre de vie et l’impact d’un écosystème régional.
Ce que les meilleurs veulent vraiment (et que votre entreprise n’offre peut-être pas)
Le rapport de force sur le marché du travail québécois a changé. Avec une abondance d’offres, les talents les plus recherchés ne choisissent plus un emploi, mais un projet de vie et un environnement de travail qui correspondent à leurs valeurs. Le salaire et les avantages sociaux traditionnels restent importants, mais ils sont devenus des prérequis, plus des différenciateurs. Pour attirer et retenir les meilleurs, les entreprises doivent répondre à une nouvelle pyramide de besoins.
Au sommet de cette pyramide se trouve la quête de sens et d’impact. Les professionnels d’aujourd’hui veulent sentir que leur travail contribue positivement à la société ou à l’environnement. Cela explique l’attractivité croissante des entreprises certifiées B Corp, qui s’engagent légalement à avoir un impact social et environnemental positif. Une étude de cas sur GSoft, une entreprise technologique montréalaise, a montré que ses candidatures ont augmenté de 40% après l’obtention de sa certification B Corp.
Juste en dessous se situe la flexibilité radicale. Il ne s’agit plus seulement de télétravail, mais d’une autonomie réelle sur l’organisation de son temps et de son lieu de travail. La semaine de 4 jours, les horaires asynchrones et la confiance accordée aux employés sont devenus des arguments de poids. L’entreprise L’Abeille, pionnière de la semaine de 4 jours au Québec, affiche un taux de rétention de 95% et attire des centaines de candidatures pour chaque poste ouvert.
Enfin, le développement personnel et professionnel est une attente non négociable. Les meilleurs talents savent que leurs compétences doivent évoluer. Ils recherchent des employeurs qui investissent activement dans leur formation, leur offrent des budgets de développement discrétionnaires et encouragent la mobilité interne. Cette culture de l’apprentissage continu est perçue comme un élément clé de la rémunération globale. Les questions posées en entrevue par les candidats ont radicalement changé, reflétant ces nouvelles priorités.
- Quelle est votre politique sur la semaine de 4 jours ou les horaires flexibles ?
- Comment mesurez-vous l’impact social et environnemental de l’entreprise ?
- Quel budget annuel allouez-vous au développement professionnel par employé ?
- Soutenez-vous la santé mentale au-delà du Programme d’Aide aux Employés (PAE) traditionnel ?
- Offrez-vous des congés parentaux bonifiés au-delà du Régime québécois d’assurance parentale (RQAP) ?
- Quelle est votre position sur le droit à la déconnexion ?
Ils ne viennent pas que pour le salaire : les vrais arguments pour convaincre un talent international
Pour combler ses besoins en main-d’œuvre, le Québec mise massivement sur l’immigration. Comprendre les arguments utilisés pour attirer les talents internationaux est une excellente façon de décoder la valeur réelle d’une offre d’emploi au Québec, même pour un résident local. En effet, ces arguments mettent en lumière des avantages souvent implicites ou sous-évalués qui composent le « package québécois ».
Le premier argument, au-delà du salaire, est la qualité de vie et la sécurité. Cela inclut l’accès à un système de santé public, la sécurité des villes, la qualité de l’environnement et l’équilibre travail-famille. Un élément central de cet argument est le Régime québécois d’assurance parentale (RQAP), l’un des plus généreux au monde, qui offre des congés de maternité, de paternité et parentaux étendus. Cet avantage, difficilement quantifiable en dollars, est un facteur de décision majeur pour les familles.
Le deuxième pilier est l’ensemble des avantages sociaux non salariaux. Une analyse comparative a montré que ces avantages peuvent représenter une valeur considérable. En incluant l’assurance maladie publique, l’assurance médicaments, les programmes d’épargne-retraite subventionnés et l’accès à une éducation de qualité et abordable pour les enfants, le package total peut s’avérer très compétitif. Pour un talent international, ces éléments peuvent représenter jusqu’à 35 000 $ d’avantages annuels non salariaux par rapport à un package purement salarial dans un autre pays.
Enfin, l’argument de l’intégration et de l’accompagnement devient de plus en plus structuré. Les employeurs les plus stratégiques ne se contentent plus d’offrir un emploi ; ils proposent un « package d’atterrissage ». Cela peut inclure des cours de francisation payés pour le travailleur et son conjoint, une aide à la recherche d’emploi pour le partenaire, un soutien pour la recherche de logement et l’inscription des enfants à l’école. Négocier ces éléments est devenu courant, en particulier dans les secteurs technologiques et de l’ingénierie, car ils garantissent une intégration réussie et durable.
En tant que candidat, qu’il soit local ou international, comprendre ces trois niveaux d’arguments vous donne des leviers de négociation puissants. La discussion ne doit pas porter uniquement sur le salaire brut, mais sur la valeur totale de l’offre : salaire, avantages sociaux, flexibilité, formation et soutien à l’intégration.
À retenir
- Le marché du travail québécois est avant tout façonné par des forces structurelles : démographie, syndicalisation et géographie économique.
- Les compétences humaines, notamment l’intelligence culturelle et la capacité d’apprentissage, priment de plus en plus sur le diplôme initial.
- La valeur d’une offre d’emploi se calcule au-delà du salaire, en intégrant les avantages sociaux, la flexibilité et la qualité de vie (le « calcul de la valeur réelle »).
Le guide du nouvel arrivant pour décrocher un emploi au Québec (et le garder)
Pour un nouvel arrivant, maîtriser les codes implicites du marché du travail québécois est aussi important que d’avoir les bonnes compétences techniques. La culture professionnelle nord-américaine, avec ses spécificités québécoises, peut être déroutante. Le succès ne dépend pas seulement de ce que vous savez faire, but de votre capacité à le communiquer de la bonne manière et à tisser des liens efficacement.
L’un des mythes les plus tenaces est que postuler en ligne suffit. En réalité, le réseautage est la porte d’entrée principale du marché caché de l’emploi. Des études montrent que le réseau professionnel représente jusqu’à 70% des embauches au Québec. Participer aux « 5 à 7 », ces événements de réseautage informels, n’est pas une option, mais une stratégie. Il faut y aller avec des objectifs clairs : non pas pour demander un emploi, mais pour créer des contacts, s’informer et obtenir des rencontres d’information.
Le CV est un autre point crucial. Le format québécois est factuel, axé sur les réalisations chiffrées (méthode STAR : Situation, Tâche, Action, Résultat) et ne doit jamais dépasser deux pages. Exit la photo, l’âge ou la situation familiale. Le document doit être optimisé pour les systèmes de suivi des candidatures (ATS) avec les bons mots-clés du secteur. De même, la préparation de références professionnelles, idéalement locales ou nord-américaines, est une étape non négociable du processus.
Une fois en poste, la période de probation (généralement de 3 à 6 mois) est une phase d’observation mutuelle. Il est essentiel de décoder la culture d’entreprise : le tutoiement est la norme, la prise d’initiative est attendue et le travail se fait souvent de manière consensuelle. Démontrer son autonomie tout en sachant quand poser des questions est un équilibre délicat à trouver. La maîtrise progressive du français, si ce n’est pas votre langue première, reste le facteur d’intégration professionnelle et sociale le plus déterminant à long terme.
Feuille de route : maîtriser les codes du marché du travail québécois
- Adapter votre CV : Utilisez le format québécois (2 pages max, sans photo, chronologie inversée) et intégrez des mots-clés pertinents pour les logiciels de recrutement (ATS).
- Maîtriser l’art du 5 à 7 : Arrivez vers 17h30, fixez-vous un objectif de 2-3 contacts ciblés et assurez un suivi par courriel ou LinkedIn dans les 48 heures.
- Préparer vos références : Identifiez 3 anciens superviseurs ou clients (idéalement québécois ou nord-américains) prêts à témoigner de vos compétences et réalisations.
- Équilibrer l’entrevue : Utilisez la méthode STAR pour présenter vos succès de manière factuelle, en combinant confiance dans vos réalisations et humilité dans votre attitude.
- Naviguer la culture organisationnelle : Observez et adaptez-vous rapidement au tutoiement généralisé, à la recherche de consensus en réunion et à l’autonomie attendue dans la gestion de vos tâches.
Construire une carrière à l’épreuve du futur au Québec est donc un exercice de stratégie bien plus qu’une simple recherche d’emploi. En comprenant les forces structurelles, en cultivant les bonnes compétences humaines et en décodant la culture locale, vous vous donnez les moyens de faire des choix éclairés et de bâtir une trajectoire professionnelle qui a du sens. Pour mettre en pratique ces conseils, l’étape suivante consiste à réaliser votre propre audit de compétences et à définir votre plan de carrière stratégique en fonction de ces nouvelles variables.
Questions fréquentes sur la carrière au Québec
Qu’est-ce que la formule Rand et comment m’affecte-t-elle?
La formule Rand est une disposition légale au Québec qui oblige tous les employés faisant partie d’une unité de négociation (un groupe de postes couverts par une convention collective) à payer des cotisations syndicales, qu’ils choisissent d’être membres du syndicat ou non. Concrètement, cela signifie qu’un pourcentage de votre salaire brut, généralement entre 1% et 2%, sera automatiquement déduit pour financer les activités du syndicat qui négocie vos conditions de travail.
Comment l’ancienneté influence-t-elle ma progression de carrière?
Dans un milieu de travail syndiqué, l’ancienneté (votre temps de service continu dans l’entreprise) est souvent le critère principal, voire unique, pour déterminer l’accès aux promotions, le choix des horaires de travail, l’attribution des vacances et la protection contre les mises à pied. Par exemple, lors d’un affichage de poste interne, un employé avec 5 ans d’ancienneté aura priorité sur un collègue potentiellement plus qualifié mais embauché plus récemment.
Secteur public syndiqué ou privé non-syndiqué : quel calcul faire?
Le calcul doit aller au-delà du salaire brut. Par exemple, un poste dans le secteur public syndiqué pourrait offrir un salaire de 65 000 $, mais avec des avantages sociaux (fonds de pension à prestations déterminées, assurances complètes) d’une valeur estimée à 20 000 $ par an, pour une rémunération globale de 85 000 $. En comparaison, un poste dans le secteur privé non-syndiqué pourrait afficher un salaire plus élevé de 80 000 $, mais avec des avantages plus limités valant 8 000 $, pour un total de 88 000 $. L’offre du privé semble supérieure, mais elle s’accompagne souvent d’une sécurité d’emploi moindre.